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Un Architecte "béton"

Entre flâneries et déambulations parisiennes, arrêtons-nous sur l'un des architectes emblématiques de l'entre-deux Guerre : Mallet-Stevens. Zoom sur une œuvre originale et un esprit d'une modernité radicale.

Robert Mallet-Stevens (1886-1945)étudie à l’Ecole spéciale d’architecture.Il débute comme critique d’architecture où il découvre et s’inspire des ateliers viennois : il se revendiquera d’ailleurs par la suite élève de Josef Hoffmann.Son expérience en tant que décorateur de cinéma marque sa carrière et contribue à placer la lumière et le volume au cœur de son œuvre.Dès lors, il s’insère au cœur du cercle des artistes décorateurs mais aussi des cinéastes grâce auxquels il rencontre le couturier Paul Poiret. Malgré son manque d’expérience, le couturier choisit de lui confier les rênes de la construction du château Mézy (1921-1923). Bien qu’inachevée, cette première œuvre introduit la
vision de l’architecte en faveur d’une nouvelle forme d’architecture. Suivant une démarche radicale, Robert Mallet-Stevens favorise l’organisation de ses constructions autour d’un centre unique. Influencé par l’œuvre de son ami Le Corbusier, Robert Mallet-Stevens défend l’idée d’une architecture épurée, tournée vers l’extérieur et structurée par l’utilisation des toits-terrasse et des larges baies. A la suite de ce premier projet, la carrière de l’architecte décolle. Sollicité par le Vicomte de Noailles, il est en charge de la construction de sa villa de Hyères entre 1923 et 1928. A cette occasion, l’architecte joue sur les volumes en emboîtant les pièces, favorisant ainsi la structure intérieure plutôt que la façade. La lumière et la taille des baies restent une question centrale pour son projet. Au regard des édifices dont il est à l’origine, se dessine une théorie et une manière de faire propre et personnelle qui démontre le génie de Robert Mallet-Stevens. En effet, l’artiste met en place un procédé théorique où il prône des surfaces unies, des arêtes vives, des courbes nettes et des matières polies. La matière justement est aussi une question primordiale de son œuvre. Défendeur de l’utilisation du béton armé, il reconnaît à cette matière de nouvelles possibilités mais aussi l’apprécie pour la rupture et la modernité qu’elle exprime.A Paris, Robert Mallet- Stevens va avoir l’opportunité d’exprimer sa vision. Au cœur du XVIe arrondissement, lieu d’expérimentation architecturale, Robert-Mallet Stevens se voit confier par Daniel Dreyfus, la mission de concevoir un ensemble urbain au cœur du quartier d’Auteuil. Daniel Dreyfus, propriétaire du terrain et commanditaire de ce projet avait déjà fait appel à Robert Mallet-Stevens pour la rénovation de l’Hôtel des Roches Noires de Trouville. Au cœur du projet, trois hôtels particuliers sont prévus pour M. et Mme Allatini, M Dreyfus et la famille Martel. Les travaux ont commencé en 1926 et c’est seulement un an plus tard que la rue est inaugurée, sous le nom de l’architecte.Toujours visible aujourd’hui au cours d’une visite du quartier, l’ensemble dessiné et imaginé par Robert Mallet-Stevens synthétise son ambition architecturale. Effectivement, l’architecte souhaite faire de cette rue un lieu reposant et calme où tous commerces seraient interdits. Souhaitant offrir un havre de paix à ses habitants, Robert Mallet Stevens s’oppose à des formes complexes et prône « une placidité sans tristesse », une unité des édifices où l’on élimine les barrières entre jardins et bâtiments. Au cœur de cet ensemble nous retrouvons l’utilisation du béton armé, l’importance de la lumière et de la taille des baies ainsi que l’utilisation du toit-terrasse.Robert Mallet-Stevens met en avant la sobriété des formes et des volumes et le place au cœur de son œuvre. Ne rivalisant ni avec les théories du Corbusier ni avec le génie constructiviste de Perret, c’est par l’alliance de la pratique collective, sa propre sensibilité et son entourage de créateurs que s’affirme toute l’originalité et la force de l’architecte.  

Lorraine PIPART